Prenant acte de la faillite de l’imprimé à rendre compte avec suffisamment de rapidité de l’évolution des connaissances et de naviguer dans le maquis des études complémentaires et parfois contradictoires, l’Internet affirme sa suprématie dans le domaine de la recherche documentaire. Mettre à jour ses connaissances pour fonder sa thérapeutique à partir de faits établis, sinon avérés, par la recherche clinique, c’est le but de cette discipline qui a pris essor depuis une bonne dizaine d’années et dont ce livre fait un panorama des possibilités de consultation.
Philippe AMAT tend la main au lecteur pour le guider parmi les nombreux moteurs de recherche proposés aux praticiens. Il en fait le dénombrement et propose le raisonnement méthodique à utiliser pour une interrogation efficace. Feuilleter le Mémento peut, au premier abord affoler le lecteur. En fait, s’il suit sur son ordinateur avec le clavier et la souris durant la lecture, la succession de gestes décrits avec beaucoup de clarté par l’auteur, il s’apercevra que la consultation est aisée et rationnelle. Parmi les différentes bases de données, le choix de Medline est suggéré.
Si l’intérêt et l’importance de cette nouvelle approche de formation continue du praticien de santé sont un renouvellement dans la mise à jour des connaissances, elle me semble plus concerner les médecins prescripteurs que les odontologistes. En effet, les conséquences à long terme des molécules sont parfois imprévues et inattendues, différentes aussi de ce qui est observé sur le court terme d’un traitement. Une constante réévaluation des connaissances est
indispensable, d’autant que paraissent de nouvelles études contradictoires qui remettent en question les plus grandes certitudes.
Dans le domaine de santé bucco-dentaire, les questions qui pousseraient le praticien à interroger les bases de données semblent moins pertinentes. On se doute – pour prendre un exemple sorti du Memento – que le scellement des puits et fissures des faces occlusales des molaires ne peut qu’améliorer l’intégrité de ces dents. Il en va de même de leur fluoration. Qu’importe que le bénéfice soit de 10, 20 ou 30, il y a un bénéfice. Il semble cependant intéressant (et pas uniquement du point de vue de nos organismes de tutelles aux décisions +/- arbitraires) de montrer par exemple que « le scellement des sillons est plus efficace que le vernis fluoré, appliqué deux fois par an, pour prévenir la survenue de caries » et d’aider ainsi praticiens et patients à choisir indépendamment des promesses des fabricants.
Il en va de même pour la question de l’occlusion postérieure croisée chez l’enfant qui serait susceptible de provoquer des troubles articulaires. Les études chez l’enfant apportent une réponse négative, mais si on prend en compte les adultes les résultats s’inversent. La réponse dépend largement de la formulation de la question, mais quel orthodontiste laisserait sans réagir une telle situation chez un enfant en voyant s’établir une asymétrie du visage et une déviation de l’occlusion ?
Par ailleurs, il faut redouter ces conférences de consensus qui, si les organismes sociaux s’en mêlent, vont faire régner sur l’exercice libéral un climat totalitaire qui va déposséder le praticien de son autonomie. Dans notre exercice il n’a jusqu’ici pas démérité, et réalisé maintes innovations souvent à l’encontre de l’académisme dominant. Le mieux peut parfois être l’ennemi du bien.
Si je suis un peu réservé pour la consultation dans la pratique quotidienne de ces bases de données, elles me semblent par contre indispensables pour remplacer ces bibliographies interminables qui encombrent le moindre article publié. Elle paraît indispensable à l’étudiant et au chercheur, elle est un formidable outil pour la Formation continue. Le Mémento de Philippe AMAT fournit les adresses des sites à consulter. Avec lui il est possible de consulter les travaux du monde entier sans sortir de sa chambre, et d’y demeurer en repos. Le bonheur donc, selon Pascal.
Par curiosité, j’ai désiré consulter les bases de données sur une question sur laquelle je m’interroge : y a-t-il une relation entre la
Contention orthodontique et la Rééducation corporelle ? La question pourrait être :
Population/patient et/ou problème : chez les patients ayant bénéficié d’un traitement orthodontique…
Intervention : la mise en oeuvre d’une rééducation posturale…
Comparaison : versus l’absence de rééducation posturale…
Issue clinique recherchée : rend-t-elle la contention orthodontique plus efficace ?
La recherche des données publiées avec les termes « Orthodontic retention », « Postural balance », « postural reeducation »… n’apporte aucune réponse.
Voilà un thème de recherches prometteur que je suggère aux jeunes praticiens.
Boris Terk